samedi 8 février 2014

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* Tu fais quoi dans la vie ?

J'écris. Je crois que j'écris. Je me persuade à longueur de temps que j'écris. J'écris que j'écris même si, en définitive, j'écris très peu. Je me consume surtout, au fil des nuits. Je ne m'endors pas. Je. A quoi tout cela rime ? Vais-je me sortir de cette torpeur en utilisant indéfiniment des mêmes artifices ? Me replier sur moi, faire gicler mon ego au quatre coins de la feuille et prier pour que quelque chose d'universel naisse de cette vaine émission...Je.

Les histoires avant tout les histoires. Nous sommes tous et chacun des ensembles d'histoires. Certains d'entre-nous vivent des histoires à peine bonnes pour un soap opéra d'Amérique du Sud. D'autres vivent des histoires fascinantes, des qui feraient des films ou des sagas livresques vendus partout dans le monde. Et enfin, pour la plus grande majorité des êtres qui peuplent cette planète, nous vivons des histoires qui oscillent tellement entre ces deux états qu'elles ne seront jamais retrouvées ni dans aucun livre, ni dans aucune telenovela.

Aussi, il y a des œuvres et des histoires qui n'appartiennent en rien à la réalité. Il y a ces lunes à visage humain, ces verts soleils et ces pluies jaillissantes de la terre endormie.

Il y a...la poésie...l'art de dire en quelques mots ce qui peut prendre une vie...l'art d'expliquer un rêve en ne le racontant pas...l'art d'embrasser, non plus avec les lèvres, non plus avec les dents mais avec l'âme toute entière l'esprit contemporain. Ou l'esprit de demain. La poésie...c'est cela. C'est l'esprit de demain embrassé puissamment.

Enfin, je n'en sais rien. Peut-être ai-je fait pousser ses phrases uniquement parce que mon cerveau les interprétait comme belles et sonores, peut-être n'ont-elles à la finale qu'un sens flou voire interdit. C'est une salle tellement remplie d'eau - le cerveau - tellement débordante d'idées que l'on prémâche, de volontés en boucle répétées, répétées tant et tant qu'elles n'aboutissent jamais, ces volontés, ces envies de changer le monde, elles n'aboutissent jamais. Elles restent fœtales comme on a peur, en les menant à bien, d'y perdre toute notre peau, de se voir écarteler comme un anglais, comme l'on craint la punition pour avoir osé vivre.

Vivre en se laissant guider par la main tentatrice, celle qui porte un gant blanc, celle qui a des yeux d'enfer et de ténèbres, la main future, la main d'incertitude. Cette main qui, à son gré, peut être comme ce patin qui tourne et dessine la musique, colore les figures et sucre les instants ; tout comme elle peut être un poing, un rocher de doigts fait qui vient nous étourdir, nous déconstruire le front, nous draper nous la feuille, dans son ombre imposante. Elle peut cela la main. Elle peut ouvrir le bal ou bien nous en jeter, sans sommation -soudainement - si soudainement que les liqueurs absorbées juste avant repartent en une flaque.

De l'iode, des morceaux d'aigue-marine, des photos de classe de la troisième quatre, du parfum d'amyris, deux paires de lacets longs, un poisson-chat, du vinaigre en quantité, de l'éparpillement, une pleine corbeille de fruits : mangues, poires, clémentines et pommes empoisonnées.

Ainsi est constituée la flaque glissant au milieu des pavés comme rampait Jean au sein de sa tranchée, elle cherche à partir, à s'écouler en une cascade invisible à l’œil nu. A devenir un de mes textes en somme.

* Tu fais quoi dans la vie ?

J'écris, j'imagine...


Moebius - L'homme sur le mur




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