lundi 16 juillet 2012

Des écrans et des hommes

Au milieu de la pornographie, des positions sûrement inexactes de l'homme et de la femme, j'enlève le bouchon de cette bouteille d'encre. Elle dégage une odeur incolore, ensemble d'alcools chauds ou larme d'océan, son bleu marine rivalise avec l'air nocturne. Lorsqu'elle sèche, ensuite, sur la plaine blanche, c'est comme le sang d'une bête morte, non, c'est comme le sang du Maître des Lieux qui tombe seulement parce qu'il est infini.
Alors donc tous ces livres seraient des mues divines ? Des peaux ensanglantées d'acteurs à providences ? Peut-être. Mais que sont dans ce cas ceux qui exposent ces mues ?

On les nomme peintres ou écrivains, enfin...On les surnomme, car aujourd'hui on ne croit plus aux peintres et plus du tout aux écrivains.
Aujourd'hui on subodore qu'ils font quoi qu'il arrive quelque chose à côté, parce qu'un artiste qui vend, ce n'est plus un artiste, c'est une célébrité. C'est un cliché circulant le long de couloirs aurifères, un horrifié travesti bientôt en bien loti, un être devenu avoir...comme on les possède tant celles et ceux qui moulent le grain télévisuel.

Au beau milieu des guerres en 1080p, des exactions éternelles de la femme et de l'homme, mon encre s'évapore. Il faut bien du talent pour s'en montrer digne, de cet héritage monstre laissé par les anciens, de ces tatouages religieux et interdits d'église que sont les bons romans et les poèmes enfin.
Cependant, vu qu'apparemment trop peu sont assez valeureux pour sauver le sang bleu, l'encre évaporée s'est vu changer en un gaz mortel, en un nuage fade, électrique et acide.

Ça oui l'acidité est le génie du siècle !
Autrefois la salive se crachait en coulisses afin d'offrir au monde la plus claire des voix mais maintenant...
On mollarde sur le public, parce qu'il veut ou parce qu'on pense qu'il veut, se sentir au-dessus en lorgnant l'en-dessous. 

Paradis pour voyeurs que toutes ces émissions diablement orchestrées où l'on essaie, en coupant l'image au maximum comme l'enfant le fait d'une ribambelle lassante, de condenser tout le choquant, tout le violent et tout l'inculte. Sans doute pour attester à l'international, que la haine est plus accessible que son contraire, nommé l'amour...non...là aussi...seulement surnommé.

Au milieu des désenchantements et des millions de followers, je gratte l'encre restée au fond de la bouteille et par ma plume j'espère, effacer l'"ol". Que les fleurs resurgissent - les fleurs, ces baigneuses, au bon parfum d'orgasme - et qu'elles enterrent par leur élévation, ce plastique paysage où se meurent les saisons.

Yun Shouping - Pivoines





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