lundi 20 septembre 2021

(Prière de respecter les trois étoiles qui restent)

Qu'élaboraient-ils tous de si fondamental pour justifier l'abandon du silence ainsi que le refus des stases contemplatives ?

Qu'y avait-il dans ces verres engloutis, lapés, bus, aspirés, dissolus, d'aussi énorme et bon pour qu'ils s'y fixent absolument au détriment des arbres ou même d'un escargot ?

Quelle sensationnelle vérité rôdait près de ces bars, restaurants, terrasses, bureaux, stations-essence, rues, ruelles, trottoirs et avenue pour que ces lieux de désespérantes factures soient élus par des milliards d'humains comme l'endroit méritant tandis qu'un banc, un simple banc... farouche et vert chou, griffé partout ou presque, maudit de solitude, baisé, fichu, kaput... un simple banc brisé, craquante meringue pierreuse au dossier rôti par les fientes, erreur de la nature fabriquée pour dix balles à partir de parpaings et de boiseries destinées à nourrir cheminées, abomination, hasard, méprise... un simple banc débile et posé là, municipalement voté un soir de mars, cloué deux ans plus tard, saccagé dans la semaine puis oublié, oublié, oublié, à part par quelques zonards assez malchanceux pour se retrouver à côté de lui et assez blagueurs pour se dire qu'il y ferait bon dormir... un simple banc sauveur de vies avec vue sur pas tellement grand choses : des feuilles et de l'humidité, des remuements de rats, des raffuts de fourmi, des bruissements de poussières auparavant brindilles ou adventices trèfles... un simple banc raté, pété comme une gouttière, visqueux l'hiver, visqueux l'été, froid siège cauchemardesque qu'ados rares excepté, plus personne à présent, ne gratifiait d'une fesse le temps d'une tasse de thé... le temps d'une caresse... le temps de s'arrêter, de ranger l'appareil qui nous sert à penser... ados rares excepté (et les clodos, et des oiseaux vomisseurs de diarrhée), ce simple banc pourtant porte sur tout au monde, était charme invisible... 

Des milliers de milliers de milliers réunis sans le début d'un bout d'obligation dans des enceintes irrespirables dans le but d'entendre beaucoup moins bien la mélodie gazeuse mille fois entendue.

Des milliers de milliers de milliers réunis dans des malls impossibles, dans des halls impossibles, dans des rôles impossibles, tandis que le banc, le maudit banc, tout esseulé qu'il est, a l'Humanité dans sa manche...

Car au-delà des arbres maigres et de l'humidité, au-delà des immeubles et des rats, on pouvait voir grâce à lui en position assise sous réserve de lever un iota le visage, un dais indescriptible...

C'était

Rouge parfois

Noir souvent

Gris à l'occaz' 

C'était

Impressionnant comme la mer

Et apaisant comme elle

C'était annonciateur

Mais aussi, de temps en temps, selon l'humeur, en connexion directe avec le souvenir, qu'il fut amer ou formidable

C'était glacé et chaud comme quand on pleure

C'était ce qui a fasciné, enfant, votre petite sœur

Et vous

Et votre mère

Et votre père

Tous les enfants du monde avant qu'il dédeviennent

C'était

Sur ce banc simple, à demi-déjà sur les roses, abattu, annulé, remplacé par les herbes,

C'était... ce qu'on voyait 

Et ce qu'ont vus tous nos glorieux ancêtres

Et tout ce qu'il faut, malgré la faim, la flemme, protéger comme on peut, coûte que coûte, quitte à se croire invisible, inutile, et très seul...

C'était, depuis ce banc de rien, tout l'or et tout l'argent, 

Mariage de rubis

Collection de saphirs 

Armoire pleine à craquer d'extrêmes aigues-marines !

C'était le premier baiser et le dernier pareil.

C'était

Là où sont les étoiles et tous ceux qui nous aiment

C'était

Là où nous fûmes et là où nous serons

Là où nous manquerons...

C'était

Le ciel à l'horizon. 

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C

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