lundi 7 septembre 2020

L'exposition universelle pékinoise de 2135

 Le nombre de visiteurs sur la quinzaine s'élevait à quarante, quarante un, soit dix de plus qu'il y a vingt ans. Le président de l'exposition se félicita, intérieurement, d'un tel succès. Elle s'était tenue en plein été, du premier au quinze août, dans l'arrière d'un magasin de souvenirs et de rafraîchissements situé souterrainement à la station "Sunhe", juste à côté d'une machine à souvenirs Apple et du commissariat encore en construction. Là-bas, entre quelques photos dégriffées et quelques cartes postales impossibles à envoyer car démagnétisées. Dans un petit cagibi, de quoi faire rentrer une personne mais pas deux. Cinq mètres carré, six ? 

Là-bas, en profitant du commissariat inachevé donnant l'illusion de la police sans pour autant qu'elle se soit installée, les visiteurs - des curieux souvent amputés quelque part - avaient vu ce qu'il y avait à voir : des bites partout et des fentes de femme, toutes en latex, en silicone mais réalistes et mieux encore, "réelles". Aussi, placés sur une étagère : une pile de faux billets de banque, un œuf véritable, un compact-disc, une lettre d'amour manuscrite. C'était à peu près tout que cette collection d'objets rarissimes, en plus des fentes et bites dégoulinant de la table centrale. Un vrai petit trésor !

La prochaine édition devait avoir lieu en hiver dans la ville de San Francisco et ses moins trente degrés, sous l'ancien Golden Gate reconverti, depuis l'effondrement, en musée-patinoire. Là, là-bas, dans un autre tout petit cagibi, une autre arrière-boutique, on trouverait ce qui a existé et non plus ce qui n'existait pas. La nostalgie, même si bonne d'intention cette fois, avait définitivement remplacé tout le reste. Au grand plaisir du patronat qui, si devenu pauvre dans les faits de par l'épuisement général des ressources, avait enfin pour lui l'impression de comprendre. 



Muriel Carpentier - à 7345 mètres de profondeur





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