J'aurais pu faire les choses tout à fait à moitié, comme on monte à cheval en conduisant une mule, et répéter de ce livre l'intrigue avant d'y mettre une note et puis de m'en aller.
Mais l'oeuvre d'Aliénor, à mon sens, mérite meilleur traitement que celui que l'on sert pour ces plats indigestes que sont tous les romans (ou presque).
Parce qu'en fin de compte un livre est un lourd morceau d'âme, une large pièce de viande impossible à manger sans prendre chaque fois le risque d'y laisser quelques dents, n'en déplaisent à celles et ceux qui composent leurs pages avec des ambitions blafardes de milk-shakes, l'Art n'est pas à la vanille, encore moins à la fraise !
Or c'est bien d'Art dont il est question dans ce premier roman. D'Art sous toutes ses formes tant qu'il y a création. Et cela tombe bien puisque à cette adresse, il y a création partout et à chaque paragraphe !
Ici se créent des paysages, là se créent des fêlures, là-bas se créent des ronces ou bien des amitiés.
Lire ce livre, c'est cela, c'est faire l'observation d'une serre en mouvement constant et goûter au détail de toutes les floraisons, de la naissance première de la fleur jusqu'à sa fanation.
Entre deux s'écouleront des chapelets de saisons, des familles de chapitres et des banquets de mots toujours appétissants.
Evidemment certaines sentes seront plus rudes que d'autres et nombre d'alpinistes à la petite semaine risquent de manquer d'air, mais le sommet est tel que cela vaut le coup, même pour les lecteurs les moins habitués, d'y flamber ses poumons entièrement !
Comme nous assistons là à un phénomène rare, que je comparerai volontiers à de la neige en mai, en ceci que cette oeuvre, écrite depuis l'impertinent tunnel de la jeunesse, a pour lui une sagesse pouvant faire rougir tous les plus vieux soleils.
Et, pour parler plus directement et avec moins d'images, ce coup de maîtresse est d'autant plus rarissime qu'il est asséné avec pure franchise.
Ainsi, vous aurez également le privilège d'assister à la naissance d'une âme, celle de l'autrice, allant s'épanouissant à mesure des pages. Et de voir pareil, son génie s'épaissir comme si le territoire couvert par ce livre était en fait une cave où un rouge vivant s'osait au raffinement.
Lire le nouvel Héphaïstos, c'est donc couver une serre ainsi qu'un millésime
En gardant sur la langue et puis à la narine, chaque degré du parfum, chaque fruit de la résine.
C'est faire la découverte d'une artiste nouvelle, vous présentant sans honte le fond de sa cervelle où dansent main dans la main, le conte philosophique et le conte cruel.
Lire, enfin, le nouvel Héphaïstos, c'est encourager le courage et saluer la beauté ! Et ce pour pas très cher, en comparaison des crimes - disons-le, hors de prix - chaque jour proposés !
Voilà, il n'y a, je crois, pas besoin d'en dire plus
Car je sais qu'après cette critique, vous tous m'obéirez
Puisque finalement, comme vous m'avez lu
Alors vous la lirez ! (et si vous ne m'avez pas lu,
Lisez-la quand même, indispensable est son poème !)
Le nouvel Héphaïstos, roman d'Aliénor Helm paru aux éditions du Non Verbal
http://editionsnonverbal-ambx.net/?page_id=1447
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire